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Apprenti.e écolo… et renseigné.e?

11/05/2022 | Chiffres et faits, Progression, Questions, émotions

J’ai souvent eu des questions ou des remarques, quant à mes connaissances sur l’écologie. « Tu dois savoir ça toi, avec ton blog! ». « Ça » étant au choix : les derniers chiffres de déforestation, le coût carbone d’une tomate espagnole, les avantages et inconvénients de l’hydrogène…

Je vous le dis tout de suite : je sais à peine plus de choses que quand j’ai commencé ce blog. Bon ok, si, j’en sais davantage. Mais à l’échelle de ce qu’il y a à savoir, pas tant que ça, et pour plusieurs raisons!

Limiter les émotions

Hypersensible verte…

Ce blog, je l’ai démarré pour faire face à mes angoisses et vous raconter comment on avance petit geste par petit geste vers une vie plus verte, avec nos contradictions, nos points de blocage.

Pour le jeu Ma Petite Planète, ou parfois pour répondre à vos questions, je lis des articles bourrés de chiffres, et regarde des documentaires, alors que je n’aime pas fondamentalement ça. Je préfère lire un bon roman! Je ne retiens pas forcément tout ce que je lis, en particulier les chiffres. Bizarre pour une scientifique, me direz-vous. Peut-être. Ou pas.

Comme beaucoup, quand je lis un roman, regarde un film, écoute de la musique, les émotions sont juste là, derrière le rideau, et souvent devant… A part des faits inoffensifs (« le pull du monsieur est vert »), (euh, d’ailleurs, pourquoi a-t-il mis un pull vert? C’est plutôt vert bouteille ou vert sapin… Mmmh, ce n’est pas le choix que j’aurais fait avec ce pantalon), je digère toute information de façon intellectuelle ET émotionnelle. Et sur l’environnement, au fur et à mesure que je m’informe, mes angoisses décuplent. La peur, la colère, la tristesse s’invitent, quelques heures, quelques jours. Oui, y’a pas beaucoup de joie, d’allégresse ou de légèreté à lire les nouvelles de façon générale, et sur l’environnement encore moins. Et tout ça, c’est fatigant.

… idées noires…

Je me dis que l’humain est fou, que rien n’a de sens. Que je n’aurais pas dû avoir d’enfants, vu l’avenir de la planète et de l’humain.

Je me dis parfois que le plus simple serait peut-être d’en finir avec l’humanité tout de suite. Puisque c’est l’humanité le problème… Ben oui, ce ne sont ni les fourmis, ni le phytoplancton, ni les girafes qui ont déclenché l’extinction de la biodiversité, les pollutions ou le réchauffement climatique. L’humanité pourrait achever de s’auto-saboter dans un délire de bourses financières effondrées, de plastiques étouffants, de manque d’oxygène quand l’océan sera mort et toute la végétation disparue sous des tonnes de béton et d’enrobés… Et je me retrouve toute désespérée et démoralisée, à écrire un billet glauque et triste.

Tout en sachant que ces informations que j’ai apprises et qui me dépriment restent des connaissances de surface, quelques faits, un vernis écologique. Je pourrais approfondir, creuser, apprendre. Et faire au final comme ces journalistes spécialisés en environnement qui développent une solastalgie incurable. Néologisme pour décrire la nostalgie d’un futur qui n’aura pas lieu. Ça peut être assez violent. Je vous recommande l’ouvrage de Laure Noualhat, « Comment rester écolo sans devenir dépressif ». Scoop : c’est extrêmement difficile!

… et voir la vie en rose!

Donc je limite mes lectures et apprentissages! D’aucuns diront que je fais l’autruche. Que je vis dans le monde des bisounours. Oui, totalement. Et alors? Ce n’est pas parce que je ne lis pas entièrement le journal tous les jours, que je n’ai pas conscience des drames qui se jouent partout. Je me protège, un peu, beaucoup, c’est tout. Parce que souvent, sur l’actualité internationale, savoir ne rend pas pour autant capable d’agir. Je n’ai par exemple pas le pouvoir d’arrêter ce qui se passe en Europe de l’Est actuellement. Donc j’évite les nouvelles déprimantes du front ukrainien. Ce qui ne m’empêche pas de contribuer à mon niveau à aider les populations atteintes (dons et compagnie).

Je ne cherche pas à tout prix à m’informer. Je le fais quand c’est nécessaire de mon point de vue. Ou que ça me motive de le savoir (et non du point de vue de la société qui estime qu’on doit savoir telle ou telle chose…).

Devenir expert?

Nous sommes une famille qui accorde une certaine importance au savoir scientifique, prouvé, validé par les pairs, basé sur des chiffres fiables et vérifiés. J’ai travaillé quelques années en recherche, puis en bureau d’études (analyse de données), enfin en collectivité (décisions basées sur des analyses fines technico-économiques). Et mon Homme est chercheur, dans un domaine scientifique… forcément, ça crée de la déformation professionnelle.

A une époque où les données n’ont jamais été aussi nombreuses et disponibles, deux tendances sociétales rendent la quête de connaissances fiables parfois difficile :

  • Notre société déteste le tiède, les nuances, les réponses à la normande, les cas multiples. Il faut simplifier, réduire, trancher, choisir son camp, décider si c’est bien ou mal, si on est pour ou si on est contre. Donc les informations que l’on trouve facilement sont simplifiées et ont choisi leur camp…
  • Notre société aime les punchlines, le court, le bref. Au diable les longues analyses, celles qui pèsent le pour et le contre, qui détaillent les cas, les points de vue nuancés… Donc les informations que l’on trouve facilement sont tronquées, voire fausses.

La nécessaire simplification des articles de fond…

Dans les sources d’informations, tout ce qui est un tant soit peu long, et fait par des professionnels, a une place à part. Les journalistes ou experts de leur domaine sont a priori dignes de confiance. Surtout si le résultat nécessite un certain temps d’exposition : un article de plusieurs pages, un livre, une émission ou intervention qui dépasse cinq minutes.

Nous avons tous besoin des journalistes, pour nous imprégner d’actualité, de connaissances, de faits. Ils prennent un sujet de fond ou d’actualité, l’analysent et en tirent un article, ou deux, un livre éventuellement, une chronique, une émission, pour résumer leur sujet. Leur travail est difficile, indispensable, précieux.

Pour avoir eu plusieurs expériences dans le cadre de notre travail, mon Homme et moi restons pourtant extrêmement prudents par rapport aux journalistes. Nous savons à quel point il est impossible de résumer fidèlement un sujet complet et complexe dans un article qui prend quelques minutes à lire. Les nuances sont bannies, les cas particuliers et les exceptions aussi, les visions contradictoires déconseillées. L’ensemble des données, faits, informations qui occupent plusieurs serveurs, des équipes entières de personnes, des armoires pleines de documents, des longues carrières de petites mains, de directeurs ou d’experts, des années de travail ou d’études, se retrouve aplati en quelques pages au mieux, en quelques minutes de lecture, d’écoute radio, ou de visionnage TV…

Et les personnes qui ont contribué à alimenter la rédaction d’un article, lors d’entretiens qui ont duré plusieurs heures en cumulé, qui ont donné des documents de fonds ou de synthèse, sautent souvent au plafond à la vue du résultat… Ce résultat, que ce soit un article ou un reportage, est forcément simplifié et donc simpliste, réducteur et donc tronqué, partie prenante et donc partial et partiel.

L’esprit critique… et modeste!

Je ne dis pas que le travail des journalistes est mauvais, ce n’est pas mon idée. C’est juste que le lecteur, la lectrice, doit garder en tête à chaque instant, que ce qu’il / elle apprend en quelques minutes, au mieux quelques dizaines de minutes, n’est qu’un reflet flou et simplifié de ce que recouvre le sujet décrit.

A nous de nous méfier de notre cerveau qui veut avoir du noir ou du blanc, mais pas de gris. C’est à nous d’apprendre à creuser une question, à ne pas prendre pour argent comptant la première chose que l’on a lue sur tel ou tel dossier. A nous de deviner qu’après deux heures de lecture (et actuellement, quelqu’un qui lit deux heures sur un sujet, c’est déjà beaucoup!), nous n’en saurons pas autant que la personne qui travaille sur le sujet depuis dix ans… Ca paraît une évidence dit comme ça. Et pourtant, que c’est long et difficile à accepter!

Et encore, là, je parle d’articles ou de reportages de fond, faits par des pros…

…les sources d’informations non vérifiées…

Actuellement c’est plutôt simple d’accumuler du savoir « brut ». Internet regorge de chiffres, de faits, de vérités déjà démoulées, prêtes à servir. Les librairies regorgent d’ouvrages qui étudient tel ou tel sujet de façon plus détaillée qu’un billet internet, mais sous une forme très accessible. Si vous cherchez bien, certaines émissions de TV ou de radio peuvent vous enseigner des choses fiables, autrement qu’à coups de grand spectacle (je pense qu’il faut vraiment être exigeant…)…

Sauf que les ouvrages de tête de gondole (qui dit tête de gondole dit « sensationnel ») ont souvent un parti pris de départ, défendent un point de vue. Les sites sur lesquels il est possible de trouver de l’info ont une ligne éditoriale, un objectif, un public ciblé. Internet est le royaume des copier-coller sortis de leur contexte, de chiffres repris et déformés, et surtout des affirmations non vérifiées.

La première difficulté est donc de choisir sa source d’informations, et plutôt ses sources d’informations. De savoir croiser et critiquer les chiffres, faits, affirmations ainsi trouvées. De toujours se méfier de ce que l’on lit ou entend, surtout si c’est court et sensationnel. C’est un travail à part entière.

… rendent difficile une vision complète et informée

Le tout cumulé fait que les informations et les connaissances qui sont accessibles sont insuffisantes, simplifiées, caricaturales, tranchées. Parfois juste fausses. Or je connais peu de personnes prêtes à lire des pavés énormes théoriques, ou plusieurs ouvrages, ou à passer beaucoup, beaucoup de temps à apprendre sur un sujet, pour le maîtriser de fond en comble, avantages et inconvénients, avant de s’exprimer. Et moi la première. Par exemple, je n’ai lu aucun rapport du GIEC en entier. Vous l’avez fait vous?

Même quand le savoir, partiel, que nous avons trouvé et assimilé est juste, il ne nous rend pas pour autant expert. Enfin si, mais expert de comptoir… C’est un risque énorme, et avéré, et qui porte un nom scientifique que j’adore : l’effet Dunning-Kruger. Moins on en sait, plus on est sûr de soi! Le summum étant alors Socrate « Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien ». Ouah!

En gros, avoir lu et compris un article de « Science et Vie » sur la relativité générale ne fait pas de vous un physicien et encore moins un Einstein…

Et ce ne sont pas les deux années passées qui nous diront le contraire, quant à cet effet Dunning-Kruger!!! Combien d’épidémiologistes improvisés, de médecins auto-proclamés, d’infectiologues diplômés dans une pochette surprise, de gestionnaires de crise impromptus avons-nous compté de par le monde? Qui d’entre nous n’a pas prononcé une phrase à l’emporte-pièce en mode « enfin quand même, c’est pas bien compliqué de faire ci ou ça, et d’arrêter avec leurs conneries…??? ». Voilà, hop, expert de comptoir! Ca marche aussi lors des coupes du monde, où toute personne intéressée devient sélectionneur ou entraîneur en puissance…

Les émotions sont vraies et justes

Je m’informe donc parcimonieusement. Et j’arrose de prudence, quand je relate des données, des faits. J’essaie de préciser mes sources, d’avoir dégrossi en amont les plus grosses erreurs possibles. Je prends des précautions : « j’ai lu que », « il me semble que ». Et bien sûr qu’un expert de tel ou tel domaine, en lisant les articles de ce blog, pourra certainement y trouver des bêtises. Mais… de toute façon, l’objectif de ce blog n’est pas de vous apprendre des chiffres et des faits scientifiques!!!

Là où je sais que ce que je dis est vrai, c’est quand je vous parle de mes questionnements, de mes émotions, ou de mes accomplissements. Pas de science, pas d’études. Du récit. Là, je sais que je suis juste!

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