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En colère d’être écolo malgré elle…

14/10/2022 | Au quotidien

Au café, dans des discussions, quand la conversation arrive sur le mode de vie, et qu’inévitablement, elle se prend un « Purée, t’es écolo toi! », ça la met en colère. En rage même. Parce que, ce qu’elle fait depuis longtemps qui est vu comme « écolo » actuellement, elle l’a fait par souci d’économie et par choix, pour préserver son budget…

Verre à moitié vide ou à moitié plein?

Verre à moitié vide ou plein, parfois, elle ne sait plus. Elle ne connaît pas les chiffres, elle ne sait pas si elle fait partie des « français moyens », si elle est dans la moyenne de salaire, de mode de vie, d’aisance ou que sais-je.

Elle peut voir le verre à moitie plein. Elle a un travail sûr, qui se passe plutôt bien, elle est en bonne santé, ses enfants aussi, elle a un toit sur sa tête, un appartement bien placé dont elle rembourse les traites du prêt chaque mois. Sa famille l’entoure, ses parents, son frère. Elle a des amis. Elle sait bien qu’il y en a beaucoup qui ont des conditions de vie bien plus difficiles que les siennes. Bref, le verre à moitié plein.

Et le verre à moitié vide : élever seule trois gamins, depuis quelques années. Son budget est millimétré. Elle est en vigilance permanente sur ses dépenses, sur les optimisations possibles. Elle est ultra-organisée, déteste l’imprévu, surtout celui qui amène des dépenses non prévues… Elle est toujours sage, raisonnable, mesurée, dans le calcul.

Des choix, elle en a faits. Elle a choisi de rester où elle est pour son travail. Pas cher payé, certes, mais le rapport quantité de stress et temps passé, par rapport à son salaire, lui convient, et elle ne sait pas où elle pourrait le retrouver. Elle a choisi de rester propriétaire. Enfin, propriétaire… elle rembourse pour encore 14 ans un prêt pour son appartement, auprès de LA banque qui a bien voulu d’elle! Sa famille pratique la musique. C’est un choix coûteux, pour elle et les enfants. Mais c’est sa soupape, son plaisir et son luxe. Des instruments pas trop chers, guitare, flûte.

Un mode de vie économe…

Et ces choix qu’elle a faits impliquent un mode de vie frugal sur pleins d’autres aspects. Son appartement bien placé lui permet de se déplacer en transports en commun, à pied ou à vélo la majorité du temps. Sa vieille guimbarde sert principalement le weekend. Elle limite ainsi les frais d’entretien, et de carburant surtout.

Les charges incompressibles

Les charges de l’appartement? Elle n’a pas vraiment le choix quand les appels du syndic arrivent, provisions sur travaux, etc. Elle optimise donc ses charges personnelles, l’énergie en particulier. Le chauffage à 19 degrés, elle n’a pas attendu les recommandations écolo! La chasse aux lumières inutilement allumées, c’est un sport. La surveillance des appareils inutilement branchés, un réflexe. Le dégivrage de son frigo, un exercice régulier. Pour sa consommation d’eau, c’est vigilance permanente également. Les recommandations pour des douches de 4 minutes? Elle y passe deux minutes top chrono, et les enfants aussi. Elle récupère l’eau en cuisine pour arroser ses plantations potagères du balcon, et l’eau des douches pour alimenter au quotidien la chasse d’eau.

Idem pour les charges concernant les enfants, scolarité, cantine, garderie… Elle a choisi l’école publique près de chez elle, pour le côté pratique, et aussi parce qu’elle n’aurait pas pu leur offrir une école alternative, pas à tous, pas là comme ça, toute seule, malgré son envie et son admiration pour des systèmes d’éducation différents. Heureusement que la cantine ou la garderie sont indexées sur le quotient familial. Bien sûr, elle a un réseau de parents autour d’elle, les parents des amis des gamins… Le système D. Celui qui lui permet de garder la tête hors de l’eau, lorsqu’un gamin est malade ou qu’elle a un empêchement. La logistique autour des enfants, une charge mentale impensable!

Le contrôle des dépenses

Le seconde main? Elle ne connaît que ça. Pour le matériel bébé, il y a quelques années, pour les vêtements de la famille, pour l’électroménager. Le bon coin ou Vinted, c’est sa virée shopping à elle, depuis longtemps déjà. Elle fréquente les soldes lorsqu’elle doit renouveler ses jeans qui craquent, au bout de plusieurs années. Oui, les jeans, elle les achète neufs, et en solde. Vu la durée qu’elle souhaite leur faire tenir, elle ne veut pas acheter de pantalon « pré-usé »!

Les produits DIY, si tendance actuellement? Ca fait longtemps qu’elle fait elle-même sa lessive ou son produit pour le lave-vaisselle, c’est tellement moins cher! Idem pour les produits de ménage, il n’y a pas besoin d’autre chose que de vinaigre blanc, si?

Quant à tout ce qui est bricolage et réparation, elle est championne. Bien qu’entièrement aménagé en occasion, son appartement est chaleureux. Elle a mis au goût du jour ses récupérations, un coup de peinture, parfois un coup de scie sur des pieds moches… Et elle s’active sur la machine à coudre récupérée de sa grand-mère, ce qui lui permet de faire durer les vêtements, les siens, ceux des enfants. Les vêtements trop usés deviennent des lingettes ou des essuie-tout lavables.

Côté féminité, elle est en paix avec elle-même. Elle accepte sereinement ses premiers cheveux blancs : c’est autant d’économies chez le coiffeur. Elle ne se maquille que rarement : autant d’économies sur les produits de maquillage, et de démaquillage, qui coûtent si cher, et se périment si vite… Les protections lavables? Elle s’y est mise dès que ça s’est un peu démocratisé, elle avait fait son calcul, et vu la perspective lointaine de la ménopause lors de l’achat, c’était rentabilisé en quelques années.

L’alimentation frugale

Sur l’alimentation, elle a aussi fait des choix. Il faut peut-être préciser qu’elle veut manger sain… et qu’elle aime les bons produits, bruts, aussi sains que possibles… A la fois pour son goût, et pour la santé de sa famille. Elle est très documentée sur le sujet. Et comme la bonne viande et le bon poisson coûtent cher, ils sont quasiment végétariens. Elle assure l’apport en protéines grâce aux oeufs, aux produits laitiers.

Elle ne peut pas se permettre une alimentation exclusivement bio dans son budget, ça ne rentre pas. Ni le bio de supermarché, ni Biocoop. Alors elle slalome dans les rayons du supermarché, lit les étiquettes, choisit soigneusement les produits qu’elle achète. Elle surveille les prix, les promotions. En gardant un oeil sur les provenances et les saisons. Elle passe au rayon vrac, qui est apparu ces dernières années, et où elle s’approvisionne sur quelques produits soigneusement sélectionnés pour leur rapport qualité-prix.

Pour le frais, elle fréquente le marché hebdomadaire, où elle a ses habitudes et ses marchands préférés. Comme ils la connaissent bien, elle récupère souvent un petit bonus. Sa soupape alimentation? Quand ses parents viennent, avec le coffre garni de cageots de produits de leur potager, et des bocaux de compote maison.

Elle est drastique sur la gestion de son frigo et de ses réserves. Hors de questions de gaspiller ou de jeter quelque chose qu’elle a acheté, payé. Alors, le zéro gaspi pour des raisons écolo, ça la fait doucement rigoler. Elle le fait parce que ça coûte de l’argent de gaspiller!

Des vadrouilles raisonnables

Avec tout ça, ils y arrivent. Un mode de vie serré et rigoureux, mais plaisant. Dans sa vieille guimbarde, ils sont partis régulièrement en France, pour retrouver de la famille ou des amis, ou pour découvrir les merveilles du pays. Quelques locations pas trop chères dans des coins moins fréquentés, ou en camping.

Epargner, et rêver…

Et lentement, méthodiquement, elle choisit d’épargner.

Au cas où…

Pour plus tard. Pour quand la voiture lâchera. Pour un ravalement de l’immeuble. Pour quand les enfants voudront faire des études, quelles qu’elles soient. Elle ne veut pas qu’ils se limitent, en tout cas pas trop, dans leurs rêves ou leurs ambitions pour des raisons de localisation ou d’argent.

Et pour rêver…

Et elle épargne pour ses rêves à elle. Elle en a pleins. Ses rêves de voyage lointain d’abord. Prendre l’avion et aller découvrir New York ou l’Indonésie ou le Pérou. Ou bien aller passer une semaine dans un club un peu luxueux, dans un endroit idyllique. Elle épargne pour ses rêves, un jour peut-être, d’un pied-à-terre au bord de la mer quelque part.

Et elle épargne pour ses rêves d’une vie moins ajustée, moins frugale. Dilapider le budget alimentaire mensuel en un soir et sans inquiétude, dans un restaurant étoilé, où le moment ravira ses pupilles par le décor et ses papilles par les mets incroyables. Craquer sans réfléchir sur une jolie paire de bottines aperçue en vitrine, rentrer sur un coup de tête dans la boutique, ressortir avec le sac au bras, là, comme ça, légèrement. Offrir des stages à ses gamins, de poney, de surf, d’archéologie? Faire bénéficier ses proches de largesses, de cadeaux précieux, faire voler en éclats de diamants l’adage « ce qui compte, c’est l’intention » et pour une fois, faire que c’en soit le prix… Bien sûr que c’est cliché tout ça, mais n’a-t-elle pas des rêves somme toute raisonnables à l’échelle de ce que nous vend la société de consommation??

Econome donc, mais écolo?

Alors écolo? Elle? Par force, oui bien sûr. Parce que c’est désormais l’étiquette qu’elle récupère quand elle parle de son mode de vie. Mais elle est surtout économe! Car si elle avait l’argent pour vivre plus largement, et donc de façon plus polluante, elle le ferait!! Et avec quel plaisir, qu’elle le ferait!

Et voilà qu’ils viennent leur rabâcher leur sobriété, leurs économies d’eau et d’énergie, leur frugalité… Pauvres bichons de personnes qui voyageaient en avion, qui se vantent désormais de se sacrifier en restant au sol. Pauvres bichons qui laissent leur SUV au garage en se pavanant sur leurs beaux vélos neufs électriques. Braves bobos qui étalent leurs paniers bios terreux sur leurs belles nappes tendance…

Elle fulmine, elle enrage. Car elle ne renoncera à rien d’autre qu’à ses rêves, elle, dans l’affaire! Ses rêves qui ne sont pas écolo… Un mode de vie frugal et raisonnable, elle y est déjà depuis si longtemps.

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