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Manger bio pour l’environnement (2/3)

14/03/2022 | Alimentation, Au quotidien

Il y a déjà quelques temps, je vous avais donné mon avis sur « Manger bio pour sa santé ». Et je vous expliquais que le bio est la cerise sur le quinoa d’une alimentation revue et corrigée en mode « santé »…Avant de vous donner au final mon avis sur « Quels aliments acheter en bio, en priorité? », dans un article à venir, voici quelques réflexions sur les motivations environnementales d’acheter bio.

Acheter bio, c’est bon pour l’environnement par définition?

Dans l’esprit, par définition et par principe, et par rapport à son équivalent conventionnel, l’agriculture bio respecte mieux les sols et les cycles naturels, et les conditions de vie animales.

Elle utilise moins de produits chimiques, ou quand elle le fait, leur (relative) innocuité a été vérifiée. Les animaux élevés en bio ont des conditions de vie bien meilleures que les animaux élevés dans des systèmes industriels. Certains traitements sont purement et simplement interdits.

Donc oui, dans l’esprit, acheter bio est bon pour l’environnement. En principe…

Un label « bio » est-il nécessaire et suffisant pour l’environnement?

Il existe une charretée de labels agricoles, ayant tous des cahiers des charges différents. Le label « Agriculture Biologique », « AB », français est le plus évident à mon sens lorsque l’on songe à acheter bio. Il cible les produits dont la production a respecté son cahier des charges.

Le label européen, avec une feuille, est de plus en plus présent également. S’il a l’avantage d’homogénéiser les normes européennes, il a l’inconvénient d’être plus laxiste que le label « AB », en particulier sur les OGM.

Le label « AB » n’est pas suffisant

Le cahier des charges des différents labels cible les moyens de production. Il définit des modes d’exploitation, des produits ou des façons de faire autorisés ou interdits.

Ce cahier des charges ne donne aucune obligation de qualité sur le produit fini, comme je l’expliquais dans Manger bio pour sa santé. Il ne donne non plus aucune obligation sociale, même s’il précise des intentions. Peut-être avez-vous déjà vu des informations sur la production de tomates cerise espagnoles, dans la région d’Almeria, produites sous serre, dans un secteur fortement impacté par la réduction des ressources en eau, et par des travailleurs clandestins qui dormaient dans des taudis à l’arrière des serres…?

https://www.rtbf.be/info/dossier/investigation/detail_des-legumes-bio-au-gout-de-scandale-humanitaire?id=10672224

Acheter bio pour l’environnement suppose donc de vérifier d’autres aspects que simplement « le label AB ». Certains labels suffisent à eux seuls à garantir un aspect environnemental et sociétal, de type Demeter, ou Nature et Progrès. Je ne vais pas inventer des choses déjà écrites. Je vous invite à ouvrir à côté cette page-ci, par exemple : https://docteurbonnebouffe.com/labels-bios-agriculture-biologique/. Ces labels se trouvent facilement en boutiques spécialisées, pas forcément en grandes surfaces…

Le label « AB » n’est parfois pas nécessaire

Inversement, l’obtention du label bio par les agriculteurs peut relever du parcours du combattant. Il faut trois années en France de production en mode bio, avant d’obtenir le label. Donc trois années de transition difficile, qui peut rebuter certains producteurs. Il est donc possible, en particulier sur les marchés, de trouver des petits producteurs qui ont un mode de production très respectueux de l’environnement, et qui ne sont pas labellisés. En miel, en légumes parfois. Après, évidemment, il faut pouvoir démêler le vrai du faux dans les discours commerciaux, quand le label n’est pas là pour prouver le « bio »…

Et idem pour les légumes de votre potager, si vous ne traitez pas : vous produisez des légumes bio!

Dommage, la mousse n’est pas reconnue comme aliment… Y’en a plein le jardin!

Manger bio et avoir un impact environnemental négatif…

Malheureusement, c’est possible.

L’aspect local, le bio et l’environnement

C’est possible. Si vos repas comprennent régulièrement des salades, bio certes, de quinoa péruvien – mangue brésilienne – avocat d’Amérique du Sud – crevettes de Madagascar – noix de Cajou cultivées en Afrique et décortiquées au Vietnam. Si vos goûters et petits déjeuners, bio pourtant, incluent systématiquement huile de palme, chocolat, confiture de papaye, et café. Je force le trait volontairement et vous l’aurez compris : si l’aspect local n’est pas intégré dans votre panier de courses, il y a une contradiction environnementale…

https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-32955-etude.pdf

Après, il y a local et local. Il est évident que des produits exotiques viennent forcément de loin. Mais le match local – bio devient compliqué s’il faut choisir, en début de saison, entre plusieurs provenances de tomates : Sud de la France, Bretagne. La tentation est forte de la tomate locale… Erreur! Si jamais la tomate locale est produite sous serre chauffée, privilégiez largement la tomate du Sud de la France, malgré son transport. L’impact carbone du chauffage de serre explose largement celui du transport! Oui, mais comment le savoir? A ce que je sache, la tomate issue d’une serre chauffée n’a pas une forme particulière, une étiquette collée sur le coin du museau qui dirait : « Ne m’achetez pas, j’ai un impact carbone catastrophique, j’ai mûri dans une serre chauffée! ».

Le bio local et donc de saison

Manger bio pour l’environnement, c’est tenter de manger local au maximum (en excluant les serres chauffées) et donc forcément des produits de saison… Et pas seulement les fruits et légumes! La viande (agneau?), les produits laitiers (en particulier de brebis ou de chèvre), les produits de la mer ont aussi leurs saisons. Or les enseignes qui l’affichent clairement sont encore trop rares.

Pour optimiser ces critères < local / de saison / bio >, un bon moyen est déjà de connaître la saisonnalité des produits, et ce, dans sa région! Des tomates, des courgettes ou des fraises en décembre, en France, ce n’est pas très bon pour l’environnement… Cette notion commence à être bien connue. On trouve de plus en plus, soit sur internet, soit dans les librairies, des calendriers des produits alimentaires.

https://www.greenpeace.fr/guetteur/calendrier/

Pour manger local ET de saison, les solutions directes sont idéales : marchés alimentaires, AMAP, producteurs en vente directe ou en magasins à la ferme… Les initiatives se multiplient pour favoriser ces échanges courts. Et ça permet du même coup de savoir si oui ou non, les tomates viennent de serres chauffées!

Une optimisation possible de ces critères est aussi de produire dans son potager ou sur son balcon des légumes que l’on consomme. Si vous n’y mettez pas de produits chimiques, vous ne pouvez pas avoir plus local ET bio ET de saison! Alors, on parlera une autre fois du souci du terreau, des produits de jardinerie, des cultures de plants à repiquer, de la permaculture, des cultures de balcon qui prennent la pollution du boulevard, etc.

Les déchets du bio…

Du bio mauvais pour l’environnement, c’est également le cas en supermarché traditionnel. Le bio y est suremballé, surtout au rayon frais. Acheter six pommes bio et devoir jeter une cartonnette et un emballage plastique, c’est une aberration totale pour la planète! Si c’est pour l’environnement, mieux vaut éplucher des pommes traditionnelles achetées en vrac.

Ce suremballage est vrai de la majorité des achats bio de supermarché. Et ça le reste malgré le développement récent et exponentiel des rayons vrac en supermarché. Ben, les géants de la distribution n’allaient pas laisser l’exclusivité de cette tendance si juteuse aux petits distributeurs spécialisés en bio et en vrac quand même!!!

Les inventions de la bio : les boissons végétales

Par ailleurs, certains produits « bio » me semblent être des aberrations environnementales. Je vise en particulier ces inventions récentes que sont les boissons végétales, à base de riz, de noisette, d’amande et autres. Le marché de ces boissons explose. Bien sur qu’elles rendent service à certaines personnes! Mais c’est aussi un effet de mode incroyable. Or, avez-vous déjà vu les reportages sur les amandiers de Californie? Ces arbres pompent énormément d’eau pour pouvoir produire leurs précieux fruits… ce qui pose de « légers » problèmes de ressources en eau, en Californie certes, mais ailleurs aussi.

Ensuite, ces boissons végétales sont fabriquées, conditionnées en brique ou briquette tetrapack, transportées, distribuées. Et c’est de l’eau à 90% (habitude très chronophage que de lire les étiquettes d’ingrédients, mais très instructive!). La charge solide, c’est-à-dire la quantité réelle de riz, d’avoine, d’amande est de l’ordre de 6 à 10%. Sans parler des gélifiants et stabilisants qu’ils contiennent. Tout cela me laisse songeuse.

Même les laits et crème de coco! On pourrait se dire que c’est de la noix de coco pure. Que nenni! Ces produits présentent des taux réels de coco allant de 40 à 90%! Excusez-moi de préférer un produit qui contient 90% de coco, je le diluerai moi-même!!

J’ai eu ma période de lune de miel avec tous ces produits. C’était au moment où j’ai arrêté le lait animal sous toutes ses formes, il y a dix ans. Désormais, au moins en cuisine, j’utilise des mélanges basiques de purée d’amande / noisette avec de l’eau à la place du lait ou de la crème. Par exemple, pour remplacer 200ml de crème dans une quiche, je mets 200 ml d’eau et environ 20g de purée d’amandes. Ou du lait de coco dont j’ai vérifié la teneur forte en coco. Personne ne s’en est plaint…

La bio et le système

Manger bio pour l’environnement est à mon sens indissociable d’une réflexion sur l’aspect local, sur la saisonnalité, et sur une limitation des emballages. Extrêmement difficile donc d’acheter bio en supermarché classique en ayant une démarche environnementale « complète ». Il faudrait pour cela éplucher toutes les étiquettes, se renseigner sur les provenances et les cahiers des charges de chaque produit au supermarché, veiller à chaque recoin. Ce qui est au final très fatigant, voire impossible.

Certaines enseignes font ce tri pour le consommateur, en étiquetant dans leurs rayons les produits locaux, les produits de saison. En vérifiant la source de leurs produits, au-delà de la labellisation, via des cahiers de charges scrupuleux imposés à leurs fournisseurs. En adoptant des démarches volontaristes (et pas seulement associées à une promesse de profit pour leurs actionnaires…), de promotion du vrac, et de réduction du gaspillage et des déchets.

Attention pub (même s’ils ne sont pas au courant…) : ces enseignes relèvent pour la plupart du réseau Biocoop. A Rennes en particulier, les magasins Scarabée ont une démarche extrêmement engagée sur tous les aspects environnementaux. A Paris, je faisais mes courses dans un BioCBon. Aucune démarche de produits locaux, ni de saison, c’était une supérette classique, mis à part qu’elle était bio. Ah ben tiens, ils ont été rachetés par un géant de la distribution…

Soutenir des organismes qui se préoccupent réellement d’environnement

Entre les labels qui peuvent être insuffisants, les histoires de local / pas local, le saison / pas de saison, le suremballage, les intérêts financiers sous-jacents et la motivation réelle pour l’environnement, je ne vois qu’une solution de manger bio avec un objectif environnemental. C’est de, autant que possible, aussi souvent que possible, sortir du système des super-hypermarchés, malgré leur praticité, les coûts abordables, malgré leurs services de drive désormais, qui font gagner du temps aux personnes débordées par le travail / les gamins / les trajets…

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