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Ramener sa fraise…

04/04/2022 | Alimentation, Au quotidien

Si vous me lisez régulièrement, vous aurez compris que, chez Famy VertMousse, l’alimentation est un levier facile d’action envers la planète. Nous sommes presque végétariens. Et nos courses sont majoritairement bio, végétales, de saison, et locales dès qu’on peut. Oui, évidemment, il est toujours possible de faire mieux. Sur le local, entre autres, j’ai pas encore trouvé d’avocats bretons… Et j’ai des lecteurs qui me demandent si je suis végane. Non. Et ne le serai sans doute jamais.

De nombreux réflexes et habitudes verts ont pris place dans notre cuisine, et nous ne nous en rendons même plus compte. Or dans ce blog, mon propos premier reste de raconter nos difficultés, nos réticences, saluer les efforts, et reconnaître que non, ce n’est pas simple de changer d’habitudes, avec pour objectif d’encourager et d’entraîner mes lecteurs. En restant autant que faire se peut tolérante en mode « chacun fait ce qu’il peut », « chacun part de là où il est »…

Et puis la réalité me rattrape régulièrement. Et je réalise qu’il y a désormais des gestes ou des achats que je tolérais totalement, voire pratiquais, il y a encore quelques temps, et qui me crispent quand même beaucoup aujourd’hui…

L’apéro d’hiver

L’apéro en question :

Josette et Ghislaine se retrouvent pour l’apéro, un soir de février…

 » tiens j’ai pensé à toi pour l’apéro, je t’ai acheté des tomates cerise bio. Vu que je sais que tu fais attention à ce que tu manges et que mon apéro chips-cacahuètes ne te plaît pas vraiment…
– Ah merci, c’est sympa de penser à ça… Euh… Vraiment, c’est super sympa… Euh, tu permets que je fasse ma chieuse?
– Ta chieuse? Ben comme d’habitude!! Qu’est-ce qu’il y a encore, c’est pas bien ce que j’ai fait? Elles sont bio tes tomates là, c’est quoi le problème?
– Ben on est en février, ce n’est vraiment pas la saison des tomates, et du coup, elles viennent d’Espagne ou du Maroc. Tiens regarde, Espagne pour celles-ci. Et du coup, elles ont poussé en serres, sans doute chauffées…
– Oh tu fais chier, la prochaine fois, tu boufferas des chips et des cacahuètes comme tout le monde, merde à la fin.
– Mais non, ce n’est pas la solution. Je suis vraiment touchée que tu aies pensé à moi. Je te dis juste que sur ce coup-là, c’est du « faux bon bio », tu crois bien faire, le marketing, les grandes surfaces, tout te fait croire que c’est bien. Et en fait non. Ce n’est même pas de ta faute, c’est le système qui nous fait croire qu’on peut manger des fraises à Noël et des poires en juin… Des tomates, à partir de juin, je serai ravie d’en déguster. Par contre, en février, si tu veux vraiment me faire plaisir avec du végétal à l’apéro, tu me prépares des bâtonnets de carotte, avec une sauce, du houmous tiens, et c’est parfait!
– Ah ben voilà! Des carottes… Ok. En plus, ça sera moins cher de te couper deux carottes que d’acheter ces tomates!
– Eh ben tu vois, tout le monde sera gagnant.

Pas de tomates en hiver!

En hiver, à l’apéro, nous trouvons encore trop souvent des tomates cerises. Ce n’est pas la saison!! Avant juin, il n’y a pas vraiment de tomates de pleine terre (est-ce que ça existe encore???) et de pleine saison… Oui, c’est difficile d’attendre, je vous l’accorde pleinement. On a tellement hâte de retrouver ces légumes et fruits d’été. Mais il FAUT résister! Si nous n’achetons plus de tomates cerise quand ce n’est pas la saison, les producteurs seront bien obligés de s’adapter.

Alors évidemment, en termes d’impact total, peut-être qu’il vaut mieux consommer des tomates cerises en février que de manger du saucisson, de la viande et des produits industriels à l’apéro… Mais tant qu’à manger des produits frais à l’apéro, les carottes de février font alors très bien l’affaire…

Fleurs de saison…

La publicité à la radio.

L’épisode

L’épisode que je vais vous raconter a déjà eu lieu il y a quelques semaines… Je roule, oui, dans ma voiture polluante et occupée par une seule personne. Oui, ce n’est pas bien, je sais que c’est un domaine dans lequel nous avons moults progrès à faire. Bref. J’écoute la radio, comme souvent en voiture. Alors, pas de radio « intelligente » pour moi, je ne suis pas fan des émissions où les gens parlent. Je veux de la musique bien rythmée et commerciale, ou mes sketchs préférés. Oui, je sais, j’assume, j’ai des goûts de m…%$##… musicaux ou radio.

Donc je roule et je finis d’écouter un sketch sur « Rires et Chansons ». Ça enchaîne sur un autre sketch. L’humoriste annonce : « Cette semaine dans votre supermarché, la barquette de fraises est à trois euros. Seulement trois euros la barquette de fraises, promotion valable jusque samedi ». Je souris ironiquement. Pour une fois un sketch qui dénonce les fruits hors saison et se moque de notre société, qui a perdu la tête quant à son alimentation…

Puis je réalise que c’est une publicité. C’est une publicité début mars pour des fraises.

Publicité et réalité

La saison des fraises, c’est la toute fin du printemps, puis l’été. A Plougastel, la fête des fraises, c’est le 12 juin, au début de la pleine saison. Avant, ce sont des fraises qui ont été forcées, dans des serres chauffées, ou des fraises qui viennent de loin, de serres également, peut-être de l’océan de serres en plastique de la région d’Almeria en Espagne?

Et cette publicité pour des fraises début mars me met dans une colère dingue. Je suis seule au volant, et je bouillonne. La publicité est une pourriture, qui entretient des habitudes délétères, de consommation déconnectée de la réalité. Non, il n’y a pas de fraises en mars. Oui, mars est un mois difficile pour les produits frais. C’est la période de transition entre les légumes d’hiver qui se terminent, et les primeurs qui ne sont pas encore totalement là. Donc début mars, on pourrait faire de la pub pour toutes sortes de choux, pour des légumes-racines, pour des courges ou des pommes qui se sont conservées tout l’hiver. Mais pas pour des fraises!!!

Et je sais bien qu’on a hâte de retrouver les produits d’été, les courgettes, les poivrons, les aubergines, les fruits gorgés de soleil de l’été, les fruits rouges, les melons, les pastèques. Mais début mars, malgré notre hâte et notre impatience, on est encore trèèès loin de cette saison!

Inadmissible

Et ça me fait mesurer à quel point j’ai bougé sur ce thème de la saisonnalité, acquis des convictions et réflexes assez forts. Il y a encore quelques années, j’achetais des courgettes et des tomates toute l’année. Et je ne me posais pas de questions. L’offre existe toute l’année en supermarchés. Et c’est quelque chose qui n’est plus possible pour nous.

Et ma colère est en fait plus large que cela. Elle s’adresse au système des supermarchés et des producteurs « hors saison ». A la publicité qui s’assoit sur notre avenir, tant que leurs clients et eux font des profits. A notre naïveté et notre ignorance générales, quant à l’impact de nos gestes quotidiens.

Faut-il en passer par des lois qui interdiront la publicité pour les produits alimentaires polluants…? Eh beh, je vous le dis, ça changerait notre paysage! Exit les publicités pour tous les produits fortement transformés, pour les produits issus d’animaux (y compris les produits laitiers), pour les produits suremballés, pour les fruits et légumes hors saison.

A partir du moment où l’on sait que l’humain est sensible à la publicité, pourquoi n’utilise-t-on pas ce levier pour des messages « vertueux »? Et pas des pubs où c’est un produit tout pourri (au hasard, céréales ou biscuits pour enfants…) où quelqu’un récite à la fin à toute vitesse « il est déconseillé de manger trop gras, trop salé, trop sucré, mangez au moins 5 fruits et légumes par jour ». Non, pas ça. Une vraie pub qui donnera envie à tout le monde de goûter des produits frais et de saison… Et de faire son goûter avec du pain et une pomme…? Ok, je rêve à clavier ouvert…

Tarte à la fraise…

Ce qui est drôle, c’est que quasiment le même jour où j’ai entendu cette publicité pour des fraises hors saison à la radio, ma fille ainée était chargée de faire un dessert pour l’anniversaire d’une amie. Et elle m’envoie un message pour rajouter des ingrédients sur la liste de courses, en me disant « je ne sais pas quoi lui faire, et elle adore les fruits rouges. Je pensais lui faire une tarte aux fraises, tu veux bien acheter des fraises, elle sera trop contente? Je sais que c’est pas bien, mais je n’ai pas d’autre idée, s’iiiiiiil-te-pléééé ». Bon, mon sang n’a fait qu’un tour « Naaaaaaan, ma fille, pas toi! Pas des fraises en mars!!! ».

Et nous avons échangé, jusqu’à nous mettre d’accord qu’un cheesecake avec un coulis fruits rouges (à partir de surgelés… je me suis dit que c’était un peu moins pire quand même), c’était méga-super top. Et que la tarte aux fraises, ça serait mieux pour son amie qui a son anniversaire début juin!! Je lui ai fait les courses pour le cheesecake, qui était totalement réussi. Enfin, c’est ce qu’on m’a dit, je n’ai pas eu la chance d’y goûter, sniff. Et ma saisonnalité était heureuse!

Mais ces quelques épisodes m’ont fait prendre conscience qu’il y a des sujets sur lesquels ça devient difficile pour moi de rester totalement zen, d’en discuter sans m’agacer, sans m’énerver. Alors je me rappelle que nous sommes très mauvais sur les transports ou sur le logement. Alors que certaines personnes ont largement franchi le pas du vélo, du « pas d’avion », ou de la tiny house.

Et je me dis qu’ils doivent avoir vis à vis de nous la même réaction, que celle que j’ai vis à vis des mangeurs de fraises en mars. Et je me détends un peu. Chacun part de là où il est…!!

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